Exposition collective au CEAAC

Des lampes, des assiettes, des balais, des verres en cristal, des vases : cela pourrait ressembler à un inventaire à la Prévert aux allures ménagères. Il s’agit en réalité des types de biens vendus par l’entreprise Neunreiter à la fin du XIXème siècle dans le bâtiment Art Nouveau qu’occupe actuellement le Centre européen d’actions artistiques contemporaines (CEAAC). De cette enveloppe architecturale déjà singulière, « Au Bonheur »fait surgir une charge historique déconcertante : celle d’un passé commercial atypique, annonçant déjà à l’époque les prémices du règne de l’objet de consommation.

Le titre de l’exposition, emprunté au onzième volume des Rougon-Macquart de Zola, charrie avec lui un peu de cette frénésie consommatrice qui ne nous a plus quittés depuis. De « l’objet de commodité » à l’artefact, il ne manque plus que l’œuvre d’art pour brouiller les pistes de l’utilitaire, du décoratif, du sériel et de l’unique, et nous plonger dans le monde merveilleux de la vie des choses. Les lampes de Julie Béna, généralement utilisées comme des éléments de décor et d’interaction dans ses films et performances, ont remplacé la gamme de luminaires originellement vendus entre ces murs. Avec Accumulations, Françoise Saur dissimule, derrière l’amoncellement d’objets en porcelaine, en cristal ou en nacre, la puissance personnelle et émotionnelle de biens qui, aussi standards soit-il, ont un jour appartenu à quelqu’un – en l’occurrence, la mère de l’artiste. Par touches successives, chaque œuvre se propose comme une alternative aux objets de Neunreiter. Elles se glissent dans leurs contours, parfois dans leur fonction, et les augmentent toujours de détails porteurs de sens et de détournements symboliques. Bavardes, elles affirment leur autonomie et presque, même, leur humanité. (...)

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